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La vie à Philadelphie...
28 juillet 2008

L'expatriation vue par...

...Estelle.

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Estelle savourant, comme a son habitude, les petits plaisirs de la vie quotidienne

 

Quand je suis arrivée a Philadelphie, en 2005, j'ai un jour reçu un e-mail de ma copine Catherine me disant : "Va sur ce blog : la fille a l'air super sympa, elle fait des bonnes petites choses a manger et elle habite pas loin de Philadelphie."

Et c'est comme ça que j'ai commencé a correspondre avec Estelle. Elle a été ma première copine française dans la région ; elle m'a ensuite présentée a d'autres Françaises expatriées et... vous connaissez la suite.

Merci d'avoir répondu a cette interview, ma chère Estelle !

 

1) Depuis quand es-tu expatriée aux Etats-Unis ?  

 

Depuis le 10 juin 2002. 

 

 

 

2) Pourquoi t'es-tu expatriée ?  

 

Mon diplôme d'ingénieur chimiste en poche, je me suis mise à la recherche d'un emploi.  

 

Une amie m'avait parlé du Volontariat International en Entreprise (VIE), le programme qui remplace la coopération du service national. C'est un programme destiné aux 18-28 ans qui offre la possibilité de travailler entre six et 24 mois pour une entreprise française à l'étranger. Le VIE est aujourd'hui très prisé par les jeunes diplômés mais, à mon époque, il n'était pas très connu.  

 

J'ai postulé pour plusieurs offres pour l'entreprise chez qui "on ne passe plus par hasard", dont une en Allemagne. J'ai passé tous les entretiens avant d'entendre que le poste en Allemagne était pris mais qu'il y avait encore de la place en Italie et aux Etats-Unis. Le poste américain correspondait à mon profil et je l'ai donc accepté. 

 

 

 

3) Quelle a été l'attitude de tes proches quand tu leur as annoncé ton expatriation ?  

 

Excités. Mes parents étaient aussi soulagés de me savoir employée car les temps étaient alors difficiles pour les jeunes diplômés. 

 

 

 

4) Quels étaient tes doutes et tes peurs avant de quitter la France ?  

 

J'ai eu peur de me sentir seule et de ne pas aimer mon pays d'accueil. 

 

 

 

5) Ces doutes et ces peurs se sont-ils avérés exacts ?  

 

Heureusement, non ! J'avais une vie sociale agréable et j'ai rencontré celui qui est devenu mon mari un mois à peine après mon arrivée. 

 

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Photo Estelle

 

 

 

6) D'un point de vue pratique et au niveau des formalités, ton installation aux Etats-Unis a-t-elle été facile ?  

 

Sur le coup, tout m'avait paru compliqué mais, avec le recul, je me rends compte que cela aurait pu bien plus mal se passer. J'aurais simplement voulu que les choses se passent plus rapidement mais il faut savoir être patient avec l'administration. 

 

 

 

7) Et d'un point de vue affectif et émotionnel ?  

 

Les débuts ont été un peu durs : ce n'est pas facile de commencer un nouvel emploi mais quand, en plus, on change d'environnement et de pays, on devient plus fragile d'un point de vue émotionnel. J'ai commencé à me sentir mieux huit mois environ après mon arrivée sur le sol américain. 

   

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Photo Estelle

 

 

 

8) Y a-t-il quelque chose que tu ferais différemment concernant ton installation/expatriation aux Etats-Unis ?  

 

Non. Mon installation s'est très bien passée ; j'ai eu de la chance dans la mesure où j'ai côtoyé beaucoup de personnes dans ma situation, au travail. Il y avait une bonne vingtaine de jeunes Français sur mon site et donc pas mal d'entraide. 

 

 

 

9) Y a-t-il une personne qui t'a particulièrement aidée dans ton installation/expatriation (que ce soit a travers un bon conseil, une aide financière, une simple présence amicale...) ?  

 

Il y en a eu plusieurs.  

 

Mon manager, Chris, Français vivant aux Etats-Unis depuis a l'époque 14 ans. Il m'a aidée dans les différentes démarches administratives, a trouver un appartement ; il m'a conduite au supermarché, a "Costco"… Bref, il m'a vraiment aidée à m'installer. Il a tout fait pour que je ne vive pas avec les autres stagiaires français : il voulait vraiment que je découvre le pays seule. Jennifer, sa secrétaire, m'a ensuite fait découvrir tous les bons endroits ou dépenser son argent !  

 

Il y a aussi eu Vanessa, la fille qui m'a vendu sa voiture, qui m'a baladée un peu partout en attendant que je sois autonome. Ces personnes m'ont vraiment permis de commencer l'aventure américaine du bon pied. 

 

 

 

10) As-tu un travail aux Etats-Unis ?  

 

Si oui : lequel et, surtout, a-t-il un rapport avec ce que tu faisais (ou étudiais) en France ?  

 

Si non : es-tu actuellement en recherche d'un travail et, surtout, as-tu l'impression que c'est plus facile ou plus difficile que dans ton pays (barrière de la langue, démarches et mode de fonctionnement différents...) ?  

 

J'ai un travail : je réponds à des appels d'offres pour mon entreprise qui conçoit et commercialise des systèmes administratifs pour les établissements d'enseignement supérieur.  

 

Par choix, j'ai complètement laissé mon domaine de formation derrière moi. Mon entreprise cherchait une personne bilingue français/anglais pour répondre aux appels d'offres canadiens. J'ai vite découvert que les personnes bilingues français/anglais AVEC un permis de travail sont très recherchées aux Etats-Unis. Je conseille toujours aux Français que je rencontre ici de taper "French" sur "monster.com" et de postuler à toutes les offres car la plupart des postulants n'ont pas de permis de travail.

 

 

 

Globalement, je pense qu'il est plus facile de trouver du travail ici qu'en France, surtout lorsqu'on recherche une deuxième ou troisième expérience professionnelle. C'est aussi plus facile de complètement changer de carrière, ici. Je ne pense pas que j'aurais pu aussi radicalement changer de domaine en France. Cela dit, je pense que le premier emploi n'est pas aussi facile à trouver que je l'imaginais. Ici aussi, on galère ! 

 

 

 

11) La France te manque-t-elle ?  

 

Au début, oui ; mais maintenant, moins. Ce sont la famille et les amis qui manquent ! 

 

 

 

12) Quand penses-tu revenir en France définitivement ? 

 

Ce n'est pas à l'ordre du jour. 

 

 

 

13) As-tu hâte de revenir en France définitivement ?  

 

Ça dépend des circonstances. Si c'est dans la région parisienne, d'où je suis originaire et où vit ma famille, je pense que je serais heureuse. 

 

 

 

14) Comment gardes-tu le contact avec ta famille et tes amis ?  

 

On communique surtout par e-mail et via "Windows Messenger". Je converse au téléphone au moins une fois par semaine avec ma famille. 

 

 

 

 

 

15) Reviens-tu souvent en France pour les vacances ?  

 

Non. Nous y retournons cet été et notre dernier séjour remonte a il y a deux ans.  

 

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Photo Estelle

 

 

 

16) Si tu es ici depuis pas mal de temps, as-tu l'impression, parfois, de te "détacher" ou de "t'éloigner" un peu de la France (de sa culture, de ses traditions, de son mode de fonctionnement...) ?  

 

Cela dépend vraiment des domaines.  

 

D'un point du vue linguistique, je pense que non, au contraire. Je fais l'effort de ne pas utiliser autant d'expressions anglo-saxonnes que les Français de France ! D'un point de vue culinaire aussi, je ne pense pas vraiment m'être américanisée. Je suis complètement larguée en matière de ragots "people" mais je me tiens au courant sur les sites de "Voici" ou de "Gala" - même s'il y a beaucoup trop de gens que je ne connais pas !  

 

 

 

17) Comment vois-tu/juges-tu la France et les Français maintenant que tu vis aux Etats-Unis ?  

 

Vivre aux Etats-Unis m'a vraiment ouvert les yeux sur des choses que je ne voyais pas quand je vivais en France. Commençons par le moins bon !  

 

Je trouve les Français frileux : ils ont peur du changement, de prendre des risques. Ils ne croient pas vraiment en eux. Il y a aussi une peur du ridicule qui n'existe pas vraiment ici. Ils n'ont pas forcément conscience de la chance qu'ils ont : le système de santé français est fabuleux mais il y a beaucoup d'abus. Il faudrait forcer chaque Français à passer un an ici !

 

 

Depuis que je vis ici, par contre, je trouve les Françaises vraiment élégantes. Ici, je trouve la mode un peu "trash" [de mauvais goût] ; pareil pour la lingerie : il n'y a qu'à voir certaines vitrines de chez "Victoria's Secret" ! Les Françaises ont quand même la classe. 

 

 

 

18) D'après toi, comment ta famille et tes amis s'imaginent-ils ta vie d'expatriée (rêve américain, solitude, super opportunité, folie, angoisse...) ?  

 

Ma famille a une bonne idée de mon quotidien – après tout, ils sont déjà venus ici ! Mes amis sont assez réalistes aussi ; je pense qu'ils sont plutôt choqués par le capitalisme barbare à l'américaine et qu'ils ne m'envient pas vraiment, surtout pour les congés : ils en ont au moins le double !    

 

 

 

19) Ta vision des Etats-Unis a-t-elle changé - en bien ou en mal - depuis ton expatriation ?  

 

Je ne sais pas trop. Ça fait quand même un moment que je vis ici. Je me suis habituée à beaucoup de choses. Il faudrait peut-être que je retourne en France pour voir les Etats-Unis avec un œil neuf ! 

 

 

 

20) Trouves-tu ta vie actuelle aux Etats-Unis plus agréable ou moins agréable que ton ancienne vie en France ?  

 

Je ne peux pas comparer mes deux vies : je suis née et j'ai grandi en France mais c'est ici que je suis vraiment devenue adulte, que j'ai commencé à gagner ma vie. Avant de venir ici, je vivais chez mes parents ! Je peux cependant comparer ma vie à celle de mes copines de promo et je pense qu'elle est plus agréable d'un point de vue matériel. 

 

 

 

 

 

21) Depuis ton expatriation, te sens-tu plutôt française, européenne ou américaine ?  

 

Je me suis vraiment sentie européenne en arrivant ici. Cela dit, je ne me définis pas vraiment par ma citoyenneté : après tout, mes parents sont eux aussi immigrés. Je ne peux pas dire que je suis 56 % Française et 32 % Turque… Quand on me demande d'où je suis, j'aime dire : "I am from France" ["Je viens de France"] plutôt que : "I am French" ["Je suis Française"]. C'est plus proche de la manière dont je vis les choses. 

 

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Photo Estelle

 

 

 

22) Aux Etats-Unis, as-tu plus de connaissances/amis américains ou français ?

 

Au quotidien, je ne côtoie pas de Français. Je suis assez proche de mes collègues de travail américaines que je considère comme des amies.  

 

 

 

23) Cela te convient-il ?  

 

Oui. 

 

 

 

24) Si je te dis que tu dois définitivement repartir en France dans deux mois, quelle est ta première réaction (joie, tristesse, panique, soulagement...) ?  

 

Tout dépend des conditions ! Si mon mari et moi avons tous les deux un travail pas loin de chez mes parents, je serais ravie ! Mais si c'est pour galérer loin de ma famille et recommencer à zéro, je préfère autant rester ici. 

 

 

 

25) L'expérience de l'expatriation a-t-elle changé ta façon de voir le monde - et la vie en général ? 

 

Oui, beaucoup. Je pense que j'apprécie aujourd'hui des choses que je ne voyais pas avant. 

 

 

 

26) Que dirais-tu a ceux a qui l'on vient de proposer l'expatriation aux Etats-Unis mais qui ont peur et se posent mille et une questions ?  

 

Tout dépend de la personne.  

 

Quand je suis arrivée aux Etats-Unis, j'étais jeune diplômée, célibataire, sans expérience professionnelle. Je n'avais rien à perdre en venant ici, au contraire ! Je suis arrivée avec deux valises et une véritable envie de découvrir le monde.    

 

Maintenant, je suis mariée, j'ai un enfant et, si une telle occasion se présentait aujourd'hui, je ne prendrais pas la décision à la légère, comme je l'avais fait il y a six ans. Si on est jeune et sans attaches, il faut foncer ! Sinon, il faut bien réfléchir et avoir une idée précise de ce que chaque membre de la famille attend d'une expatriation. Ce n'est jamais facile de recommencer à zéro mais c'est toujours plus facile quand on est jeune. 

 

 

 

27) T'imagines-tu un jour t'expatrier dans un autre pays ? Lequel ?  

 

Pour une courte durée, six mois par exemple, pourquoi pas ? Sinon, je ne suis pas sûre ; en tout cas, pas maintenant. C'est difficile de reprendre à zéro. J'étais un peu insouciante en arrivant ici mais je sais aujourd'hui que c'est très facile de rater une expatriation.

 

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Dans les jardins de Longwood

 

Photo Estelle

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Commentaires
N
Quelle excellente idée cet article, j'adore !<br /> Bravo et continu ...<br /> Biz,<br /> Nathalie (http://blog.evolutionpartner.com/)
F
Je lis le blog d'Estelle depuis longtemps et reconnais beaucoup de choses comme les abus du système de santé francais... Je sais que la Suède est assez américanisée (surtout si on voit ca d'un point de vue franco-francais) ais lá j'aurais pu répondre la même chose dans bien des cas! Surprenant!<br /> <br /> Encore merci pour cette interview!
M
Je suis le blog d'Estelle depuis peu mais dès la première fois, j'ai bien accroché. Cette interview me rappelle mes 10 années d'expat aux Pays-Bas, donc largement pas aussi loin que toi, Estelle. D'accord pour dire que s'expatrier quand on est jeune et sans conjoint est plus simple. Et puis, statistiquement, on finit rapidement par trouver l'élu(e) de son coeur dans son pays d'adoption: mon mari est néerlandais...<br /> Merci à vous deux de nous avoir fait partager cet entretien!
M
Ca fait plaisir de relire le parcours d'Estelle car c'est le premier blog d'expatriée que j'ai lu et ensuite le tien. Et depuis je ne vous suis avec toujours autant de plaisir.
F
Je reconnais bien l'optimisme d'Estelle, dont j'adore le blog ...
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